Une
résolution du 7 mai 1739 introduit une messe
d'agonisant, dite pour tout confrère dangereusement
malade. A son décès, les confrères
assistent aux funérailles et passent à
l'offrande. Par la suite, la confrérie organise
à ses frais un obit chanté pour chaque
confrère décédé et six
messes pour le repos de son âme.
Les
anciens archevêques de Cambrai avaient en leur
temps accordé un autre avantage spirituel :
une indulgence de quarante jours aux personnes qui
visiteraient l'église Saint-Vincent à
Soignies le jour du saint patron et qui y prieraient
aux fins ordinaires. En 1832, selon le constat que
le recours vers Dieu, par cet intercesseur, pour les
besoins spirituels et temporels, augmente depuis
nombre d'années, le doyen de Saint-Moulin
supplie son évêque au nom du clergé
et des habitants de la Cité sonégienne
d'accorder -en l'étendant quelque peu- cette
indulgence à toute personne de la paroisse
ou étrangère qui prierait dans l'église
dans l'octave de Saint-Vincent et le lundi de Pentecôte.
Monseigneur Jean-Joseph Delplancq accepte pourvu qu'il
soit récité chaque fois un pater
et un ave, avec les actes de foi, d'espérance,
de charité et de contrition. Cette indulgence
sera a nouveau accordée par Monseigneur Edmond
Joseph Dumont le 23 juin 1876.
Dans
le cadre de l'érection canonique de la nouvelle
confrérie, le pape Pie IX accorde, par un indult
du 19 mai 1876, une indulgence plénière
à tous les confrères. Pour l'obtenir,
ils se confessent et reçoivent la sainte communion
le jour de leur entrée ou le dimanche suivant.
A l'article de la mort, ils invoquent dévotement
notre seigneur Jésus Christ après s'être
confessés et avoir communié. A la Pentecôte,
à la fête de Saint-Vincent, à
l'Assomption et à la Toussaint, ils reçoivent
les sacrements de pénitence et d'eucharistie,
visitent l'église et y prient. Une indulgence
identique est accordée à tout fidèle
qui reçoit les mêmes sacrements et qui
fait le pèlerinage le lundi de Pentecôte
et récite cinq pater et cinq ave.
Par décret de la Congrégation des
Indulgences du 6 octobre 1870, ces indulgences sont
applicables aux âmes du Purgatoire; la communion
peut être reçue la veille du pèlerinage
ou dans une autre église que celle de Soignies.
Selon la lettre du vicaire général Haliez
au doyen François, l'indult est de stricte
interprétation et il n'est pas nécessaire
de faire le Grand Tour, la visite de l'église
suffit.
Le
15 mai 1845, le vicaire général Descamps
procède à une visite de l'église
paroissiale de Soignies. Dans son rapport, deux points
intéressent les confréries sonégiennes.
Dans un premier temps, il charge le curé-doyen
de visiter les bannières et étendards
de toutes les confréries et de veiller, sous
sa responsabilité personnelle, à réparer
ceux qui seraient en mauvais état (déchirure,
rouille). Le plus important est qu'il est fait mention
de quinze associations pieuses, dont trois seulement
paraissent en ordre. Le doyen devra "débrouiller
ce chaos et mettre à l'ordre tous les directeurs
de ces confréries". En effet, ils se seraient
rendus indépendants de leur curé.
En
1859, il est dressé un tableau des confréries;
elles n'y sont plus que dix. Celle de Saint-Vincent
y apparaît bonne dernière et de toutes
les informations qui pourraient être reprises
dans le tableau, il n'y a qu'une observation en ce
qui concerne son administration. Il y est fait état
qu'un seul et unique membre gère l'association
avec l'accord, explicite ou implicite, des autres.
Que
ce soit en 1845 ou en 1859, ces remarques sont, somme
toute, dans la logique même des choses au regard
des statuts que les confrères de Saint-Vincent
se sont donnés (1739) et qu'ils continuent
d'appliquer (1836). Ce document qui règle la
vie de l'association ne donne aucune indication quant
aux rapports que la confrérie entretient avec
le curé, et parle encore moins de tutelle spirituelle.
Comme il a étê dit plus haut, la majeure
partie des pouvoirs de la société est
entre les mains d'un seul homme, le maître.
Les
statuts de 1876, revus en 1981, vont résoudre
ces pierres d'achoppement. Les postes à responsabilités
vont s'accroître démocratiquement. Le
curé de la paroisse devient de droit le directeur
spirituel de la confrérie. Les nominations
et les fonctions des connétable, maître,
sous-maître et trésorier-secrétaire
sont clairement et largement définies. Il en
va de même des deux structures représentatives,
le conseil et l'assemblée générale.
Ces modifications reconnaissent certaines pratiques
de droit et de fait, comme le rôle du connétable
et des anciens confrères, le mode de nomination
du maître ou encore la place du curé
au sein de l'association pieuse. Néanmoins,
ce passage -cet accouchement- ne s'est pas déroulé
sans difficultés.
Le
16 juillet 1871, suite à l'occupation de Rome,
un grand pèlerinage diocésain va regrouper
à Soignies près de 40 000 personnes,
dont Mgr Catiani, nonce apostolique et le vicaire
général Ponceau, représentant
Mgr Labis, évêque de Tournai. De nombreuses
châsses y participeront. Cet événement
va probablement être un catalyseur en vue de
la célébration du douzième centenaire
de la mort de saint Vincent qui aura lieu en 1877.
Et, en corollaire, un regard sera porté sur
la confrérie qui n'aurait pas été
restaurée canoniquement après le concordat
et qui aurait ainsi perdu ses avantages spirituels.
"En
1873, une nouvelle commission est nommée";
elle sera vraisemblablement présidée
par le doyen François. Le coffre de la confrérie
se trouvait alors chez un certain Maximilien Dubois,
cabaretier au faubourg d'Enghien. Le détenteur
de sa clef en est un Laveine, qui refuse de la donner
à la commission. Celle-ci décide de
forcer le coffre. R. Riche indique que cela ne s'est
pas fait " sans que la justice ait eu à
intervenir mais sans suite ". Quelques
mois plus tard, en 1876, Jules-César François
présente les nouveaux statuts à son
évêque, non sans avoir effectué
des recherches à Rome. Mgr Dumont les approuve
en juin de la même année. Le cap de la
modernité vient d'être franchi face à
une réticence de certains, sclérosés
par l'inertie, une réticence teintée
de traditionalisme, voire de protectionnisme.
Au
cours du XIXe siècle, la vie de la confrérie
Saint-Vincent de Soignies est marquée par deux
jalons. Les années 1830, avec le dynamisme
du curé Maximilien de Saint-Moulin, voient
l'épanouissement de la vitalité catholique
après les durs moments du régime hollandais.
La confrérie repart sur ses bases de l'Ancien
Régime. Les années 1870 voient des réformes
sociales et l'anniversaire du décès
du saint patron et préparent la guerre scolaire.
La paroisse de Soignies est placée sous le
décanat de Jules-César François.
Ce curé a voulu accomplir des réformes
et a dû affronter de nombreuses contradictions;
en 1879, il sera même démis de ses fonctions
durant quelques mois.
L'histoire
de la confrérie Saint-Vincent de Soignies au
XIXe siècle a ainsi été empreinte
de la vie des hommes qui l'ont constituée et
côtoyée. Les documents littéraires
et les sources d'archives qui ont permis de la relater
pendant ces 75 années sont peu nombreux et
il en a été modestement retiré
le plus possible.
Le
trait caractéristique de cette période
est sans nul doute la transition, quelque peu lente,
de cette association d'un ancien régime à
sa contemporanéité. Un certain nombre
de redondances pourraient apparaître à
la lecture d'autres contributions traitant de la confrérie
avant 1801 et après 1876. C'est évident,
pas mal d'éléments flagrants signalent
la continuité : l'usage des statuts, la reconnaissance
des indulgences et les pratiques religieuses comme
marques de dévotion envers saint Vincent. Les
principes de base étaient déjà
présents en 1801. Le XIXe siècle ne
les a, en fait, qu'adaptés, remaniés
au travers de la pratique de l'époque et des
moeurs du temps. Fondamentalement, les expressions
de la vie associative et les devoirs et avantages
spirituels demeurent identiques; l'évolution
est essentiellement formelle et s'oriente vers une
démocratisation interne.
Pour
conclure, voici la citation qui introduit le règlement
de la confrérie Saint-Vincent dans le diplôme
d'admission édité en 1982. " La
véritable tradition, ce n'est pas seulement
de refaire les gestes que les autres ont fait, c'est
aussi et surtout de conserver l'esprit qui les a fait
faire, et qui pourrait en susciter d'autres en d'autres
temps ".