Dans
le patois de Soignies, le mot "baille" signifie
"barrière". On voit dans ce nom l'indice
d'un dispositif (évidemment assez sommaire)
de défense primitivement destiné à
protéger les maisons du faubourg d'Enghien.
Ce toponyme est attesté dès 1503. On
sait par ailleurs que des "bailles" (c'est
le nom que signalent les documents d'archives) furent
construites en divers points d'accès à
la ville durant le siècle précédent
et tout spécialement en 1424-25.
En 1693, la position très particulière
de la "cense del Bail" est précisée
par un document qui stipule : "cense del Bail
au bout du faubourg du Noeufbourg". Le Plan-terrier
de 1770 permet de préciser cette idée
et fait apparaître la cense del comme la "porte"
de la franchise. Comment s'étonner qu'on y
trouve le point de départ proprement dit ainsi
que le point d'arrivée du Grand Tour des héritiers
des "burgenses" et de leur patron.
Au retour du pèlerinage, c'est traditionnellement
à la cense del Baille (ou cense Flamand) que
se fait le relais entre le Tour et la procession de
rentrée des reliques. C'est là aussi
que l'on dépose les châsses après
le Tour et que l'on reçoit, autour d'une collation,
les autorités civiles et religieuses qui accompagneront
la rentrée solennelle de la procession.
La cense del Baille marque donc de manière
très concrète la sortie de la ville
en même temps que la fin du faubourg. De cela
témoigne parfaitement le compte-rendu que donne
en 1654 le chanoine Le Fort de la manière dont
se déroule le Tour à son époque:
"Le chef reposant sur le grand Autel se charge
sur les espaules desdits chanoines ... et se porte
sous un dais, et sous la garde du Thrésorier
... L'on marche en cet équipage par la rue
de Nieubourg, et le fauxbourg, qui est celuy, qui
meine à Ath et Enghien. Dès aussi-tost
qu'on est arrivé à la cense vulgairement
appellée la cense Del--Bail, la jeunesse ramassée
et rangée en escadron, sur le ionchoire, honnorent
les approches du sacré corps avec diverses
salves. Là les habitans de Cambron-Sainct-Vincent
viennent au rencontre ... C'est une ancienne coustume
de leur livrer le chef pour le porter, ce qui se fait
avec une grande solemnité en la présence
des quatre plus vieux chanoines, et du Bailly de la
Ville. Le Greffier civil leur fait la lecture et ostension
des joyaux et Médailles, dont il est enrichy,
et en mesme temps ils prestent le serment accoustumé
pour la relivrance. Mais les confrères de la
Sodalité de Sainct Vincent ne quittent pas
le corps, ains le portent tout aussi long que le tour
est ... Là tout le clergé s'arreste,
attendant le retour".
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