La
ferme suivante, sur la gauche, porte le curieux (sur)nom
de "Pipi Botte". Botte est un nom de famille
assez répandu dans la région et Pipi
est un "spot" comme il s'en donnait tant
autrefois. Le nom des anciens occupants est resté
à cette ferme connue à la fin du 18e
siècle sous le nom de "ferme de l'Escaille".
Ce mot renvoie ordinairement à l'ardoise ou
au schiste. Parfois un tel toponyme sert à
désigner la carrière où l'on
extrayait ce matériau. Du fait de la nature
du sol dans ce secteur (gisement de pierre bleue),
cette dernière explication ne s'applique pas
ici.
Il s'agissait sans doute autrefois d'une exploitation
agricole assez importante. C'est ce qui transparaît
en tout cas des matériaux utilisés et
de l'aspect assez imposant du corps de logis. Les
moellons de pierre bleue sont utilisés pour
la partie massive des murs. Les briques servent pour
les éléments architecturaux qu'il importe
de soigner davantage. Cette construction rurale se
distingue fondamentalement, même dans ses principes,
de celle que nous avions remarquée à
l'entrée de ce même chemin.
Les participants au Grand Tour rencontrent ici la
neuvième chapelle et la neuvième station
de leur itinéraire. Il s'agit d'une construction
de brique soigneusement chaulée.
Une pierre porte l'inscription : "Cette chapelle
fut érigée à l'honneur de St
Vincent par Vincent Botte et Jne Charlez, son épouse
et leurs enfants, l'an 1834". La statue qui se
trouvait à l'origine dans cette chapelle a
disparu. Elle a été remplacée
par le groupe modelé en plâtre et diffusé
vers 1875 à l'approche des célébrations
du 12e centenaire de la mort de saint Vincent.
Ce groupe représente saint Vincent et ses deux
fils, Landry et Dentelin. C'est la figuration traditionnelle
qui est reprise ici. Elle se caractérise surtout
par une différence de taille très frappante
entre les trois personnages. Cette différence
s'explique d'abord par la volonté de bien identifier
les enfants de saint Vincent. Ainsi, l'hagiographie
rapporte que Dentelin n'a guère vécu
que quelques années. Il est toutefois vénéré
comme saint à l'instar de ses parents, de son
frère et de ses deux soeurs.
Mais la différence de taille s'explique également
par le souci de marquer une différence dans
l'importance thaumaturgique des personnages représentés.
Saint Landry est en effet représenté
en évêque, donc à l'âge
adulte. Sa petite taille au sein du groupe et par
rapport à saint Vincent n'est qu'une manière
de mettre davantage en valeur la stature du patron
de la localité. Un procédé du
même type et exactement symétrique est
utilisé à Mons pour la figuration de
sainte Waudru et de ses deux filles.
Par ailleurs, la reconnaissance des reliques de saint
Vincent à la fin du 19e siècle a permis
de constater que les ossements conservés dans
la grande châsse forment un squelette homogène
et proviennent d'un personnage de grande taille
autour de 1.90 mètres sans doute.
La chapelle de la ferme "Pipi Botte" permet
d'insister sur le phénomène de renouvellement
ou de création d'édifices de dévotion
dans la première moitié du 19e siècle.
Peut-être faut-il y voir la réparation
des négligences ou des déprédations
consécutives à la Révolution
française?
Les pèlerins prennent ensuite la direction
de l'église de l'immaculée Conception.
Cette église constitue le cur de la paroisse
de Soignies-Carrières.
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